La recette du match Adjani-Jarre

La recette du match Adjani-Jarre

Chère Isabelle, cher Jean-Michel, bien sûr, j’ai suivi tous les épisodes de votre série de l’été, «Adjani contre Jarre» ; les photos dans Paris Match (Adjani 1 ­ Jarre 0), les photos dans VSD (Adjani : 1 ­ Jarre : 1), les photos dans Elle, (Adjani 2 ­ Jarre 1), les photos de Jarre et Parillaud dans Paris Match, (Jarre 2), la réplique d’Isabelle dans VSD, pourtant magazine officiel de Jean-Michel. (Adjani 4 ­ Jarre 3).

Voilà, naïvement, je croyais savoir tout de vous. On est presque copains, je connais même le prénom de vos enfants et ceux de vos ex, c’est dire… C’est pour cette raison que j’aimerais vous présenter Maureen Orth. C’est une plume de Vanity Fair, elle traque les vies des célébrités dans le moindre détail pour ce magazine américain. Elle est l’auteure d’un essai, The Importance of Being Famous («De l’importance d’être célèbre»), publié chez l’éditeur Henry Holt, qui décrypte les dessous de l’industrie de la célébrité. Aujourd’hui, il n’y a qu’une seule histoire qui vaille la peine d’être racontée, c’est celle qui concerne la vie privée.

«Si vous êtes une star, votre vie privée ou son fac-similé sont devenus vos meilleurs atouts», écrit Maureen Orth.

Votre travail d’artiste n’intéresse personne. Elle décrit alors une quête sans fin des acteurs et des actrices pour être à la une. Manipulations, mensonges, trahisons, la vie privée ne mérite d’être vécue qu’en une. Le moindre événement exige attachés de presse, styliste, coiffeur, artiste maquilleur, garde du corps. Exemple, un travail d’une demi-journée pour régler la sortie d’Arnold Schwarzenegger de chez lui jusqu’à sa voiture garée à une vingtaine de mètres, le jour de son investiture comme gouverneur de Californie.

Que sait-on de la politique qu’il souhaite mener ? Rien.

Parfois, dans un moment d’égarement, j’ai pensé avec sollicitude, à nos stars victimes harcelées par une meute de photographes.

Pour Maureen Orth, il n’y a pas de victimes (ou très peu), il y a surtout des drogués à la célébrité. Une fois à la une, impossible de la quitter. Alors il faut constamment trouver quelque chose pour nourrir la presse.

C’est un métier, on appelle cela un publicist.

Il faut avoir beaucoup d’imagination quand parfois la vie privée en manque.

La «spécialiste en célébrités» raconte comment certains inventent des histoires qui feront le gros titre du jour avant d’être démenties le lendemain par une nouvelle une. Cela peut être assez sordide.

Quand le livre de la soldate Jessica Lynch ­ «libérée par les troupes américaines d’un hôpital irakien» ­ a été publié, l’éditeur ayant besoin de nouvelles révélations pour son lancement, un publicist a eu une superidée. «Et si on insinuait que Jessica a pu être la victime d’un viol en Irak ?» Cela a marché, le livre a fait l’événement. Le démenti a permis de relancer un réflexe pavlovien de la presse.

Isabelle, Jean-Michel, je sais, ce n’est pas facile de s’en sortir : faire la une est une drogue dure. Et il n’existe aucune cure de désintoxication.

Colombe Schneck

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